SCHÉMA
Découvrez les procédés rares de Schéma, où la photographie se fait peinture et le dessin, photographie.
Avec son fondateur, Vassili Brault, nous parlons de la notion de « temps »: celui nécessaire à la création, à la maîtrise d’une technique. Se donner le temps de rater et réessayer, d’abandonner puis revenir, et charger ainsi l’objet d’une part émotionnelle.
Instinct : En quoi la notion de « temps » est-elle importante dans le parti-pris de Schéma ?
Vassili Brault : Tout d’abord, parce que certaines techniques que nous explorons sont très capricieuses. Nous sommes contraints au temps long par la nature même de certains procédés. Pour bien faire il faut y consacrer du temps, rater et réessayer, abandonner puis y revenir, jusqu’a comprendre et maîtriser la technique.
Ensuite, et cette fois c’est très personnel, parce que je pense que la charge émotionnelle d’un objet trouve sa force dans l’attention accordée à sa mise en oeuvre, à sa réalisation. Je crois qu’il y a un transfert d’emotion de la main vers l’objet. S’affranchir de la main permet de gagner du temps certes, mais c’est la garantie de perdre cette charge en conséquence.
Je sais que cet avis n’est pas partagé par tous. En tout cas c’est le notre, et c’est peut-être cela finalement, le parti-pris de Schéma.
Instinct : Quels savoir-faire souhaites-tu mettre en avant autant dans l’oeuvre que son support ?
Vassili Brault : Je ne suis pas sûr de pouvoir citer une chose en particulier. Mais nous sommes entourés d’artistes et d’artisans, encadreurs, tireurs qui font un travail remarquable. Nous avons pensé l’objet fini et l’approche comme un tout, tout est fait main, à Paris, avec un attention toute particulière aux détails qui font de chaque tirage un objet reconnaissable et précieux.
Instinct : Quelle est la patte artistique, la signature de Schéma ? Est-ce que tous les artistes présentés seront dans la même veine ?
Vassili Brault : Schéma fonctionne sur un principe de collections, comme une conversation de visuels avec ses médiations, ses résonances. Le choix des images, des procédés, de l’encadrement est propre à chaque collection. D’une collection à l’autre ensuite, il peut y avoir des artistes déjà édités ou des nouveaux, mais c’est une nouvelle conversation qui s’engage, avec un nouveau sujet, une nouvelle approche.
Instinct : Quelles valeurs souhaites-tu transmettre et partager ?
Vassili Brault : Le temps surement, celui de l’errance, celui des erreurs et des réajustements. Je pense que tout nous imprègne, qu’il ne faut jamais rien jeter. Il y a une sorte d’obligation de résultat aujourd’hui, une course à l’immédiateté. C’est la source de beaucoup de névroses pour ceux qui ne fonctionnent pas comme cela, c’est comme un objectif impossible à atteindre.
C’est une sorte d’écran de fumée aussi je crois, une course folle qui nous permet d’éviter l’essentiel. Il faudrait pouvoir accepter que certaines choses prennent une vie, comme apprendre à rester curieux, apprendre à rester vivant.
Dès la semaine prochaine, 3 nouveaux artistes rejoindrons la collection.